La normalisation chinoise : le regard d’Olivier Peyrat, Directeur d’AFNOR

Depuis 2016, Olivier Peyrat est conseiller en normalisation auprès du gouvernement chinois au sein du China Standardization Expert Committee pour un apporter son expertise et sa connaissance des rouages de la normalisation internationale.

Enjeux : Comment la Chine est-elle accueillie à l’ISO ?

Olivier Peyrat : A plusieurs reprises la Chine a affirmé qu’elle était en faveur du multilatéralisme. On ne peut qu’accueillir avec beaucoup de bienveillance un discours multilatéral car nous estimons que le multilatéralisme vaut mieux qu’une somme de bilatéralismes.
Par ailleurs, je pense que la philosophie chinoise et même confucéenne sur les équilibres entre les forces les induit assez naturellement à trouver des solutions harmonieuses. Le mot harmonie est très important en chinois.

S.N. : Comment percevez-vous leur plus grande implication à l’ISO ?

O.P. : La stratégie d’influence de la Chine est semblable à celle de la France, des Etats-Unis, du Japon… Chacun essaie de mettre en avant ses propositions, avec des convictions, des arguments techniques, des savoir-faire. La Chine revendique une légitimité, s’implique, fait participer ses experts, respecte les règles du jeu.

S.N. : Que penser de la montée en puissance de la Chine à l’ISO ?

O.P. : On est plus dans une logique de rattrapage que de domination. La Chine revendique sa juste place dans l’économie mondiale.

S.N. : La Chine est-elle engagée en matière de RSE ?

O.P. : La Chine a un affichage très volontariste et je pense qu’elle mettra en œuvre ce qu’elle annonce en matière de neutralité carbone.
Pour autant, sur des sujets tels que l’économie circulaire, la biodiversité, les objectifs de développement durable, lorsque les normes existent déjà au niveau international, c’est à chacun des pays d’en faire son miel, et donc à la Chine naturellement.

S.N. : Peut-on contrer des technologies chinoises peu respectueuses de la vie privée ?

O.P. : Au début des années 2000, la Chine avait tenté d’imposer un standard d’internet sans fil, le WAPI, qui aurait permis de surveiller la population. L’ISO a refusé cette option. Si la situation se produisait à nouveau, l’ISO s’opposerait à nouveau.
Sur les questions d’intelligence artificielle ou de données de santé, on peut imaginer que des normes internationales verront le jour, après débat, mais il y a fort à parier que la vision de la vie privée des Européens l’emportera.
Ça n’empêcherait probablement pas un gouvernement, outre-Atlantique ou asiatique, de se réfugier derrière une législation nationale, les normes internationales n’étant pas obligatoires. Mais l’Europe fait des propositions cohérentes à une certaine vision de l’humanité. C’est le soft power.

Catégories :Uncategorized

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